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Les écoles supérieures de filles en Alsace (1900-1917/18)

Caractéristiques

Auteur et institut Eric Ettwiller
Périodes Époque contemporaine
Thèmes Éducation
CartographeJean-Philippe Droux, CNRS (ARCHIMEDE)
EchelleAlsace
Date de création2014
SourceCarte originale
Comment citer cette sourceEric Ettwiller, « Les écoles supérieures de filles en Alsace (1900-1917/18) », in Atlas historique d'Alsace, www.atlas.historique.alsace.uha.fr, Université de Haute Alsace,

Notice de la carte

L’enseignement secondaire féminin en Alsace de 1871 à 1918

Les Allemands trouvent dans l’Alsace de 1871 un certain nombre d’externats de filles dont le plan d’études dépasse celui des écoles élémentaires. Ils les appellent höheren Töchterschulen (plus tard höheren Mädchenschulen), qu’on traduit par « écoles supérieures de filles ». C’est le nom générique, en Allemagne, des établissements d’enseignement secondaire féminin. S’ils n’ont pas encore de cadre, il existe des modèles : les écoles municipales supérieures de filles, avec leurs directions masculines et leurs plans d’études ambitieux. En Alsace, les écoles supérieures de filles sont privées et dirigées par des femmes, laïques ou religieuses (on y assimile aussi les nombreux pensionnats). En 1872, le président supérieur von Möller engage un programme visant à en germaniser une dans chaque ville importante contre l’attribution d’une subvention annuelle. On convainc trois Alsaciennes (Colmar, Guebwiller, Wissembourg). A Strasbourg, on choisit une Allemande dont l’école doit être réorganisée. A Mulhouse, où aucune directrice n’inspire confiance, on s’appuie sur les classes spéciales de l’école communale pour fonder la première école publique supérieure de filles du Reichsland. A Saverne et à Thann, on crée des établissements privés ex nihilo. En 1873, un troisième voit le jour à Sainte-Marie-aux-Mines, municipalisé dans la foulée. Cette même année, les écoles supérieures de filles sont rangées dans l’enseignement primaire. 

En 1874, la germanisation s’étend à tous les établissements. Les fermetures augmentent. On continue de créer des écoles subventionnées : privées à Haguenau (1874), Ribeauvillé (1878) et Wasselonne (1879, disparaît en 1882), municipales à Bouxwiller (1875) et Strasbourg (même année, après fermeture de l’école évoquée ci-dessus). Le privé non-subventionné compte aussi ses fondations. Elles se font surtout dans la capitale alsacienne : en 1871, la Maison des diaconesses avait créé un petit pensionnat (Bon-Pasteur), qui devient bientôt une école supérieure de filles de renom ; en 1877, des protestants libéraux fondent l’institution Saigey ; dans les années 1880, quatre autres écoles supérieures de filles sont ouvertes. Aucune création côté congréganiste durant toute la période du Reichsland en-dehors de Mulhouse : une école élémentaire fondée 1882 par la Divine Providence, école supérieure de filles en 1891. La congrégation tient encore des institutions à Colmar, Haguenau, Ribeauvillé, Rouffach et Strasbourg. Les autres à passer le Kulturkampf sont les sœurs de Notre-Dame (Strasbourg, Molsheim), de la Doctrine Chrétienne (Strasbourg), du Saint-Sacrement (Rosheim) et de l’Adoration Perpétuelle (Bellemagny→Saint-Louis→Lutterbach).

En 1887, une modification dans la législation scolaire place écoles supérieures de filles et pensionnats sous la surveillance directe de l’Oberschulrat, à l’instar du secondaire. On achève la germanisation. On uniformise. On demande des enseignantes diplômées pour les écoles supérieures de filles : elles se préparent dans des « écoles normales supérieures » (höheren Lehrerinnenseminare), annexées à quelques unes des principales écoles supérieures de filles, souvent depuis les années 1870. Enfin, on encourage la municipalisation des établissements privés subventionnés, dont le nombre augmente d’ailleurs significativement autour de 1890, avec des créations (Wasselonne, Altkirch, Sélestat) et l’octroi de subvention à des institutions déjà existantes (Barr, Bischwiller). Saverne avait clôturé un premier mouvement de municipalisations/créations municipales (1876). Après Wissembourg (1888) et Bischwiller (1890), une seconde vague marque le tournant du siècle : Guebwiller, Altkirch, Wasselonne, Barr, Colmar, Haguenau. A Munster, une fondation se fait dans le giron de la Ville. Dernières municipalisations : Sélestat en 1907 et Thann en 1909. Cette année-là, Sarre-Union fonde la dernière des écoles supérieures de filles du Reichsland. Les institutions municipales remportent un succès indéniable dans les trois grandes villes. Ailleurs, certaines connaissent un bel essor quand d’autres sont à la peine. La municipalisation des écoles privées subventionnées ne stimule pas toujours la fréquentation. Elle garantit au moins la pérennité des établissements : l’école de Ribeauvillé, aidée par l’Etat, disparaît en 1916 d’être restée privée. Les difficultés financières sont le lot de ses semblables non-subventionnées, quand elles ne peuvent pas compter sur une congrégation ou sur la Maison des diaconesses. D’où des disparitions (quatre à Mulhouse entre 1882 et 1915).

Au début du XXe siècle, nombre d’établissements fonctionnent avec un cursus complet de dix années. Certains ont une école maternelle, mixte. Des garçons fréquentent parfois aussi les petites classes. Ils peuvent ainsi suivre des cours de français. Dans les grandes classes, l’anglais figure également au programme. Les cours de religion sont obligatoires. Les écoles municipales (toutes subventionnées) et privées subventionnées (qui deviendront toutes municipales, sauf Ribeauvillé) sont non-confessionnelles. Les écoles privées supérieures de filles non-subventionnées tenues par des particulières ou des associations de parents n’affichent généralement pas, non plus, de statut confessionnel. Presque toutes ont cependant une identité confessionnelle, qui se retrouve dans la composition de l’effectif, souvent majoritairement protestant. Les catholiques plébiscitent les congrégations. La Maison des diaconesses, version luthérienne de ces dernières, remporte un franc succès avec ses deux écoles strasbourgeoises. Comme elle dispose de peu de « sœurs », le personnel est majoritairement ou totalement laïc.  

En 1906, les filles attirées par des études universitaires sont autorisées à bifurquer vers le secondaire masculin pour passer le baccalauréat. Elles sont peu nombreuses, mais le mouvement croît. Au début des années 1910, les grandes écoles supérieures de filles s’alignent sur la réforme prussienne de 1908. L’effort porte notamment sur les écoles normales supérieures, où la préparation doit passer de trois à quatre ans. Les diaconesses préfèrent renoncer : elles adopteront une autre nouveauté prussienne, la Frauenschule, sorte d’école ménagère supérieure. En 1915, le Statthalter fixe une définition légale aux écoles supérieures de filles du pays et leur assigne emploi du temps et programme officiels. Il faut tenir compte de la grande diversité des établissements : ceux qui n’ont pas un cursus de dix années avec un minimum de cinq classes mais qui se distinguent des écoles élémentaires et moyennes par un plan d’études plus approfondi comprenant français et anglais deviendront des gehobenen Mädchenschulen. Ces dernières se voient quand même reconnaître, en même temps que les écoles supérieures de filles, l’appartenance à l’enseignement secondaire. L’application des nouvelles règles n’est pas partout immédiate, à cause des difficultés de la Première Guerre mondiale. L’impact du conflit varie beaucoup d’une école à une autre.

Sources :

Archives départementales du Bas-Rhin, 11AL, 34AL, 105AL, dossiers relatifs aux écoles supérieures de filles

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